Dante, la Divine Comédie, ou la parole initiatrice et la révélation des mystères
Cet ouvrage peut être considéré comme le premier grand texte de l’Occident moderne. C’est une poésie obscure, qui rappelle les prédictions de l’augure de Delphes, présenté comme un texte initiatique, qui révèle les mystères *tout en étant obscur, oui oui c’est normal, car les mystères sont si complexes qu’il est impossible de les illuminer entièrement*
La symbolique, en particulier numérale, est très puissante dans ce texte qui dévoile les mystères de la religion (à savoir L’Enfer, Le Purgatoire, et Le Paradis) : la Divine Comédie est divisée en trois cantiques composés de trente-trois chants chacun, ce qui renvoie à la Trinité (le Père, le Fils et le Saint Esprit), *c'est-à-dire l’omnipotence et l’omniprésence de Dieu, ainsi que l’équilibre et la puissance suprêmes *. Il y a en tout cent chants, ce qui renvoie à la symbolique du un, (accentué par le fait qu’un chant est isolé), c'est-à-dire à l’Absolu de Dieu. Le poème est composé de tercets à rime enchainées *du type ABABCBCNCDC…, c'est-à-dire que la même rime se répète trois fois, embrassée avec une autre rime qui suit le même principe de façon décalée). Par cette versification, le poème devient une sorte de « tissu », fermé sur lui même (à cause des rimes embrassées).*
Dans le texte lui-même, les mots portent (aussi) une symbolique extrêmement puissante, car ils sont sémantiquement très chargés (l’exemple le plus courant de ce type de mot est « rose » qui possède de nombreuses significations et plusieurs niveaux de lecture. On peut également citer le « lune », le « crépuscule »…). *La métaphore est donc omniprésente*.
Nel mezzo del cammin di nostra vita
mi ritrovai per una selva oscura
ché la diritta via era smarrita.
Ahi quanto a dir qual era è cosa dura
esta selva selvaggia e aspra e forte
che nel pensier rinova la paura!
Tant’è amara che poco è più morte;
ma per trattar del ben ch’i’ vi trovai,
dirò de l’altre cose ch’i’ v’ho scorte.
Io non so ben ridir com’i’ v’intrai,
tant’era pien di sonno a quel punto
che la verace via abbandonai.
Ma poi ch’i’ fui al piè d’un colle giunto,
là dove terminava quella valle
che m’avea di paura il cor compunto,
guardai in alto, e vidi le sue spalle
vestite già de’ raggi del pianeta
che mena dritto altrui per ogne calle.
Allor fu la paura un poco queta
che nel lago del cor m’era durata
la notte ch’i’ passai con tanta pieta.*
Au milieu du chemin de notre vie, ayant
quitté le chemin droit, je me trouvai dans une
forêt obscure.
Ah ! qu’il serait dur de dire combien cette
forêt était sauvage, épaisse et âpre, la pensée
seule en renouvelle la peur,
elle était si amère, que guère plus ne l’est la
mort ; mais pour parler du bien que j’y trouvai,
je dirai les autres choses qui m’y apparurent.
Comment j’y entrai, je ne le saurais dire, tant
j’étais plein de sommeil quand j’abandonnai la
vraie voie,
mais, arrivé au pied d’une colline, là où se
terminait cette vallée qui de crainte m’avait
serré le coeur,
je levai mes regards, et je vis son sommet
revêtu déjà des rayons de la planète qui guide
fidèlement en tout sentier,
alors la peur qui jusqu’au fond du coeur
m’avait troublé durant la nuit que je passai avec
tant d’angoisse fut un peu apaisée.
Dante ne procède pas de manière directe, à cause des contraintes *rimes et versification* ce qui donne un langage possédant de nombreuses aspérités.
*Il peut également être utile de préciser aux éventuels lecteurs, même s’ils s’en doutent, que des trois grandes parties, le plus intéressant est bien sur l’Enfer, et le pauvre Paradis un rien ennuyeux à force de se pâmer dans la gloire de Dieu et l’émerveillement. (car, comme l’a dit Saint Augustin, « l’enfer a été fait pour les curieux »… Mais on pourrait également citer Mark Twain, qui dit « Je choisirai le paradis pour le climat, et l’enfer pour la compagnie ». (Et accessoirement Roch Carrier, «Quand un homme a connu l’enfer, il lui faut bien des ciels pour n’avoir plus envie d’y retourner »))*
(et vive les arguments d’autorité)